Pour faire du langage clair, identifiez votre public-cible 

Ça semble une évidence dans le monde de la communication : on écrit pour quelqu’un. Le public-cible n’est pas un nouveau concept. Pourtant, et pour diverses raisons, c’est l’un des premiers points qui saute quand on passe à la rédaction d’un document en langage clair.  Or, la récente norme ISO sur le sujet est très stricte…  

Quels sont les bons réflexes pour écrire en langage clair ? 

Les règles du langage clair sont désormais bien connues de la plupart des professionnels : 

 

Mémo pour les règles du langage clair

En appliquant ces points, vous respectez déjà en grande partie les règles du langage clair qu’on retrouve dans la norme ISO 24495-1 :2023. (La norme intégrale est accessible seulement à l’achat) 

Mais vous avez peut-être mis la charrue avant les bœufs.  

Toutes ces règles sont essentielles, mais insuffisantes si vous n’avez pas d’abord défini votre lectorat. Vous pouvez avoir ciselé votre message aussi finement que possible, vous risquez de viser à côté si vous ne savez pas précisément qui va le recevoir. Autrement dit, attaquer une rédaction en langage clair sans avoir profilé votre public, c’est un peu comme rédiger la plus belle déclaration d’amour à votre voisin(e) belge… mais en russe. Dommage !   

Définir votre public-cible  

Rassurez-vous, ça arrive souvent aux rédacteurs et rédactrices les plus expérimentés ! Par habitude, pour aller vite, ou parce qu’on pense déjà bien connaître ses lecteurs et lectrices, on saute aisément l’étape 1.  

Il n’est jamais trop tard pour lâcher le stylo ou lever les doigts du clavier et vous demander :  

Illustration - Qui est votre public cible quand vous écrivez ou faites une adaptation en langage clair 

Prenons l’exemple d’une personne juriste qui rédige les contrats de travail au sein d’une grande entreprise.  
L’objectif du contrat de travail est de poser les conditions d’emploi entre employé(e) et employeur.  
En général, les termes du contrat sont plutôt techniques. Ils donnent à penser que le contrat s’adresse en priorité aux personnes les plus qualifiées (soit souvent l’employeur, les responsables des ressources humaines, les personnes ayant une formation juridique…). Or, le contrat doit être aussi lisible et intelligible par toutes les parties concernées. Il doit être accessible à l’employé qui le signe, quel que soit son degré de qualification ou ses capacités intellectuelles au moment de la signature. Une formulation qui exclut d’emblée l’une des parties passe donc à côté de sa cible, et rate finalement une partie de son objectif.  

Se poser les bonnes questions pour son public 

Une fois bien identifié votre public, il faut encore vous demander l’utilité de votre document.  

Votre document est informatif ? Votre public en a-t-il besoin ? Dans quelle mesure ? Que doit lui apporter ce document précisément ?  
En répondant à ces questions, vous parviendrez à mieux cerner la priorité dans votre message.  

Votre public est-il déjà censé connaître le sujet dont on parle ?  
Là, vous adaptez la technicité de votre sujet, vous pouvez doser un peu plus précisément le degré d’informations à transmettre (en ajoutant plus de définitions si besoin).  

Pourquoi adapter un document à ses lecteurs 

Pour qu’un document soit informatif, il faut que la personne qui le découvre comprenne ce qu’elle lit (voit ou entend) dès le premier contact. Si votre public doit s’y reprendre à deux ou trois fois pour comprendre une phrase, ou s’il doit aller chercher ailleurs de quoi débroussailler votre contenu, c’est qu’il n’est pas assez clair.   

De plus, certains publics ont des besoins différents, qui réclament une attention spécifique. Une notice de médicament qui s’adresse surtout – voire seulement – à des personnes âgées doit idéalement être lisible par des personnes avec des difficultés de lecture plus importantes. On peut facilement imaginer l’effet contre-productif d’une notice rédigée en caractères minuscules, qui plus est dans un jargon technique…  

La question des notices médicales n’est d’ailleurs pas si anecdotique. En mai 2024, les résultats d’une étude européenne sur la littératie en santé ont été publiés. On y découvre que 44% des adultes français ne parviennent pas à bien comprendre et s’approprier les informations en santé.  

Les avantages du langage clair 

Si on reprend l’exemple du contrat de travail, on peut lister quelques avantages à rédiger ce document en langage clair : 

Un contrat de travail en langage clair adapté pour la compréhension de tous cela facilite la compréhension et on évite les malentendus dès la signature ; 

Un contrat de travail en langage clair adapté pour l'information du salarié chacun est parfaitement informé de ses droits et obligations au sein de l’entreprise ; 

Un contrat de travail en langage clair adapté pour plus de transparence dans les rapports cela améliore la transparence dans les rapports entre salarié et employeur ; 

Un contrat de travail en langage clair adapté pour diminuer les conflits et litiges en entreprise moins de conflits et de litiges qui reposeraient sur des ambiguïtés dans le contrat ; 

Confiance dans un contrat de travail en langage clair et adapté le salarié se sent respecté, compris, il a confiance plus facilement dans une entreprise qui parle le même langage que lui ; 

Langage clair dans le contrat de travail pour améliorer l'image de l'entreprise meilleure image de l’entreprise ; 

Le langage clair fait partie d'une bonne politique RSEengagement RSE de l’entreprise, avoir des documents accessibles et compréhensibles fait partie des bonnes pratiques de responsabilité sociale de l’entreprise ; 

Efficacité du document  

Dans le cas de certains contenus sensibles, l’efficacité du document est une vraie mission.  

Une notice de médicaments qui est mal comprise, interprétée, et ne remplit plus sa fonction, c’est un risque sanitaire grave pour les patients qui consommeront le produit.  

De même que des consignes de sécurité, un bulletin météo ou une déclaration d’impôts perdent totalement leur valeur dès lors que leur information n’est pas comprise par leur public.  

Des professionnels ont pourtant pris un temps précieux à préparer, rédiger, illustrer ces documents…  

Gagner du temps en rédigeant en langage clair 

On pourrait considérer cette étape comme chronophage : se renseigner sur l’âge, le sexe, le niveau de connaissance et d’éducation du public (qui n’est pas toujours facilement identifiable).  

C’est l’inverse, en réalité ! C’est l’étape-clé qui vous fera gagner du temps sur toutes les suivantes. Mieux vous aurez identifié la personne à qui vous vous adressez, moins vous perdrez de temps à vous demander, en rédigeant, si cette information est utile ou non, à faire le tri dans vos messages et à vous interroger sur votre degré d’accessibilité.  

Une fois défini votre public, vous pouvez déjà établir votre niveau de langage, les définitions essentielles à fournir, le cœur du message… Bref, tout va bien plus vite !  

L’étape finale à ne surtout pas oublier ! 

Enfin, pour que votre document soit en règle avec la norme ISO sur le langage clair, n’oubliez pas de le faire relire !  

Prévoyez donc une séance de relecture encadrée auprès d’un échantillon représentatif de vos lecteurs et lectrices. On y recueille leurs commentaires et impressions sur la lisibilité et la clarté du document, au moyen d’un questionnaire, d’entretiens, d’échanges.    

Votre public est ainsi présent d’un bout à l’autre de votre démarche.